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Au salon parisien du vin, les vignerons tentent de s’adapter pour survivre

Face à la baisse de consommation de vin des Français, les syndicats ont appelé à un « New Deal » du secteur, dans le but de reconquérir la jeunesse. Reportage au salon Wine Paris & Vinexpo Paris.

« Nous autres vignerons, nous sommes contraints de s’adapter, sinon on risque la disparition, comme les dinosaures ». Ce constat, dressé par le vigneron alsacien Fabien Stirn, est largement partagé par les professionnels du secteur, réunis du 12 au 14 février au salon Wine Paris & Vinexpo Paris, au parc des expositions de la porte de Versailles, à Paris.

C’est un fait : les Français boivent moins de vin qu’avant. De 1960 à 2018, leur consommation moyenne par an est passée de 129,3 litres à 40,6 litres, soit une baisse de 70% en 60 ans. « Nos grands-parents buvaient des vins de table par cubis », s’amuse Damien Ponsot, vigneron dans le Jura. « Comme pour la cigarette, le vin était omniprésent, y compris au travail. Un coup de rouge était quasiment imposé aux ouvriers », abonde Pierre-Yves Pitault-Landry, vigneron dans la Vallée de la Loire. 

Entre temps, la fameux slogan « L’abus d’alcool est dangereux pour la santé » est passé par là. « Le vin n’est pourtant pas le poison que les pires alarmistes sanitaires nous présentent. Une consommation modérée n’est pas nécessairement mauvaise, si elle est accompagnée d’une activité physique et d’une bonne alimentation », estime Fabien Stirn. L’alcool dans son ensemble est la deuxième cause de mortalité évitable en France, selon l’organisation mondiale pour la santé (OMS). Chaque année, environ 70 000 personnes meurent des conséquences directes ou indirectes de l’alcool.

« Les acteurs qui s’en sortent le mieux sont les producteurs de grands crus »

À quelques jours de l’ouverture du salon Wine Paris & Vinexpo Paris, neuf organisations professionnelles, dont la Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles (FNSEA), ont appelé à un « New Deal » du vin, véritable plan stratégique de transformation et de reconquête des marchés, ciblant notamment la jeunesse. Ils en appellent à une meilleure valorisation des vins milieu de gamme, ces bouteilles dont le prix avoisine les 10€ et qui sont celles qui subissent la plus grande baisse de consommation au niveau national. Les syndicats souhaitent également réduire de 100 000 hectares la surface de production nationale, passant de 750 000 hectares à 650 000. Enfin, ce « New Deal » comprendrait un observatoire de tendance, dans le but de s’adapter au changement de consommation et de séduire les jeunes, qui sont nombreux à préférer la bière au vin.

« Les jeunes n’ont pas été éduqués à la consommation de vin », abonde Sophie Chazalette, productrice de vin rouge bordelais. Aujourd’hui, la consommation massive de vin semble avoir laissé sa place à une volonté de boire moins et mieux. « Les acteurs qui s’en sortent le mieux sont les producteurs de grands crus. En milieu de gamme la concurrence est particulièrement rude », observe un vigneron bourguignon. De là à réduire la surface de production ? « Difficile de se prononcer sur un chiffre au global, juge Damien Ponsot. Certains secteurs ont besoin de réduire la production dans le but de tendre vers plus de qualité, comme les vins bordelais. Mais pour nos territoires de la Savoie et du Jura, une expansion de production est plutôt à l’œuvre. »

Un marketing innovant

Le vigneron jurassien considère qu’il faut mettre l’accent sur des vins légers et fruités, plus en adéquation avec les demandes que les vins bordelais, dont les taux d’alcool augmentent du fait du réchauffement climatique. « Les gens sont de plus en plus curieux. » Fabien Stirn estime lui qu’il faut se tourner vers des productions plus concentrées et minérales. « Concentrer sa production permet d’augmenter sa valorisation. »

Pierre-Yves Pitault-Landry est, pour sa part, circonspect quant à la création d’un observatoire de tendance. « Cela va occuper quelques fonctionnaires, réagit-il non sans ironie. En réalité, il nous faudrait plutôt un allègement des contraintes administratives ». « Nous devons être en mesure de mieux cibler les demandes du consommateur », estime, lui, Fabien Stirn. De son côté, Sophie Chazalette a misé sur un marketing innovant dans le but de conquérir des nouveaux publics. C’est ainsi que son domaine s’est récemment lancé dans la vente d’un vin Seigneur des Anneaux.