Des agriculteurs se sont mobilisés lundi 21 octobre, à Strasbourg, pour dénoncer les retards dans les versements des aides.
MARCO BERTORELLO / AFP 

Crise agricole : où en sont les mesures promises par le gouvernement ?

Trois salves d’annonces, des promesses et deux décrets. La mise en place des mesures visant à calmer la colère des agriculteurs est surveillée de près par les syndicats.

« Nous on a mis des propositions très concrètes sur la table (…). Si on se moquait de nous, évidemment que ça ne pourrait pas se passer dans les conditions classiques de l’accueil du président de la République le premier samedi d’ouverture du salon. » Après les trois salves d’annonces du premier ministre Gabriel Attal, répondant à deux semaines de blocages de routes et d’actions parfois tumultueuses des agriculteurs, le compte n’y est toujours pas pour Arnaud Rousseau, patron de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA). « On n’est pas dans le bon tempo, il faut accélérer le tempo », a‑t-il affirmé dimanche déplorant des annonces dépourvues d’effets concrets.

Une mise en garde et une réponse immédiate. Le chef du gouvernement recevra mardi après-midi la FNSEA et les Jeunes Agriculteurs à Matignon. La réunion se tiendra à 16 h 30 en présence du ministre de l’agriculture Marc Fesneau et de la ministre déléguée Agnès Pannier-Runacher. Point d’étape sur les différentes revendications des agriculteurs et engagements du gouvernement. 

  • Des décrets sur la taxation du GNR et les pertes liées aux maladies animales

Au rang des promesses réalisées, deux décrets sont déjà parus dans le Journal officiel au début du mois de février. Le premier concerne le gazole non-routier (GNR), point de crispation des agriculteurs. Il leur permet de demander dès aujourd’hui une avance de 50 % sur le remboursement partiel de l’accise sur les produits énergétiques du principal carburant des engins agricoles pour l’année 2024. Le second décret, lui, concerne les indemnisations aux éleveurs touchés par la maladie hémorragique épizootique. Très attendu par les éleveurs bovins, la mesure permet une augmentation de prise en charge des frais vétérinaires, ainsi qu’une meilleure indemnisation des pertes liées à la mortalité des animaux.

  • Suspension du plan Ecophyto

L’annonce de cette mesure avait été un élément déterminant pour contenir le mouvement de contestation agricole. La mise en pause du plan national Ecophyto, destiné à réduire de moitié l’usage des pesticides d’ici à 2030 (par rapport à 2015–2017), constitue une avancée notable dans les négociations engagées avec le gouvernement. Elle fait l’objet, toutefois, de vifs débats, les associations écologiques, mais également avec le syndicat de la Confédération paysanne, considérant cette décision comme l’abandon d’une politique rationnelle en matière de préservation de l’environnement.

  • Un projet de loi sur le renouvellement des générations futures attendu « fin février »

Les deux ministres chargés de l’Agriculture « verront dans la semaine chacune des organisations syndicales », notamment pour évoquer le projet de loi sur le renouvellement des générations d’agriculteurs, a précisé le cabinet de Marc Fesneau à l’Agence France-Presse. Ce texte, reporté pour être enrichi selon le gouvernement, devrait être présenté en Conseil des ministres « à la fin du mois de février » pour un vote « d’ici » juin. Celui-ci comprend une quarantaine de mesures axées sur la formation, l’innovation et la transmission-installation dans un contexte de transition de l’agriculture française.

  • Les syndicats impatients face aux promesses

Inscription de la souveraineté alimentaire dans la loi, promesse de ne pas surtransposer les directives européennes, garantie de s’opposer au traité de libre-échange avec le Mercosur… Dans ses annonces, Gabriel Attal a repris en quasi-totalité les revendications des agriculteurs. Au rang des priorités, il s’est également engagé à renforcer les sanctions en cas de non-respect des lois Egalim, qui visent à protéger la rémunération des agriculteurs. Le ministre de l’économie, Bruno Le Maire, a identifié 124 contrats, signés entre industriels et distributeurs, qui ne respectent pas ces lois et envoyé des injonctions à ces entreprises. Aussi, le premier ministre a affirmé travailler à des mesures d’exonérations fiscales pour favoriser les transmissions agricoles. Côté européen, les négociations entre l’UE et Etats membres du Mercosur (Brésil, Argentine, Paraguay et Uruguay), sont toujours en cours, malgré l’opposition de la France à ce traité. Les syndicats agricoles mettent l’exécutif sous pression. « On veut voir ce qui change dans nos fermes (…) Quand le gouvernement nous dit on va travailler sur un grand plan élevage d’ici le salon et qu’à 15 jours, on n’a pas de nouvelles… », a déploré le patron de la FNSEA.